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Anna LONGO

Actuel(le) Directeur de programme du 01/07/2019  au 30/06/2025

Direction de programme : Technologies du temps : accélération et limites

Résumé : Quelle temporalité caractérise notre époque ? Il est évident que nous ne sommes plus dans la perspective moderne d’une histoire finalisée vers l’achèvement d’un projet à vocation universelle, cependant, nous ne sommes pas non plus dans l’impasse postmoderne, dans le présent interminable de la fin de l’histoire. Notre perception du temps dépend de ce que l’on appelle le « risque existentiel » qui ne correspond pas à la probabilité, calculée, de l’extinction de l’espèce humaine. Cependant, notre présent n’est pas simplement le temps qui reste avant la fin du temps, mais il est le produit de l’accélération technologique et son idéal de simultanéité. Comme Lyotard le soutenait, les techno-sciences sont des technologies du temps. Dans une première partie de la recherche, nous allons essayer de comprendre la manière dont notre présent sans futur est produit par l’accélération algorithmique dans la finance, l’apprentissage profond et les sciences des systèmes complexes (notamment l’écologie). Nous verrons de quelle manière cette perspective temporelle est soutenue, du point de vue philosophique, par l’approche inférentialiste (Sellars, Brandom) couplée à une théorie de la cognition fondée sur la statistique bayésienne. Dans la seconde partie de la recherche, nous mettrons en lumière les limites d’une telle approche qui se révèle incapable d’adresser un véritable futur, c’est-à-dire d’un possible qui n’est pas prévisible à partir des conditions (espace de phase) données. Nous nous tournerons ainsi vers la notion d’histoire développée par le structuralisme génétique français (Lautman, Cavaillès, Gueroult, Vuillemin, Deleuze) qui propose, contre la dialectique hégélienne, une dialectique fondée sur la logique transcendantale plutôt que sur les principes de la logique générale. Au lieu de résoudre les différences dans l’identité du concept en passant par la contradiction, il s’agit davantage de montrer la puissance génératrice de la différence et les processus hétérogènes et discontinus d’individuation qu’elle laisse s’actualiser d’une manière contingente, c’est-à-dire imprévisible. Nous essaierons donc de comprendre la temporalité
qui caractérise notre époque sur la base de la complémentarité des deux approches : l’une visant à connaître le présent en tant qu'ensemble de possibles, et l’autre visant à la production d’un futur qui apparaît comme échappant au calcul des probabilités, autrement dit, comme un nouvel espace du possible.